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Rachel Androsi Ausi : « Je reçois des injures et attaques physiques parce que je combats Ebola dans ma communauté »

Rachel Androsi Ausi - « Je reçois des injures et attaques physiques parce que je combats Ebola dans ma communauté »

La maladie à virus Ebola a déjà fait 2130 décès depuis la déclaration de l’épidémie le 1er aout 2018 dans trois provinces de la République démocratique du Congo (RDC), avec un taux de létalité estimé à 67% (Ministère de la santé et OMS).

Comme d’autres partenaires, l’Organisation internationale pour les Migrations (OIM) est entièrement impliquée dans la riposte contre Ebola en collaborant avec les autorités congolaises (en particulier le « Programme national pour la santé aux frontières » - PNHF), dans la surveillance et la prévention dans environ 108 points d’entrée et points de contrôle (POE/POC) répartis dans les trois provinces touchées par l’épidémie (Ituri, Nord-Kivu et Sud-Kivu).

On utilise des informations sur la mobilité de la population pour réduire la transmission de la maladie vers de nouvelles zones de santé.

En première ligne àces Check-points, nous retrouvons des anonymes, des enseignants, des médecins et des parents qui ont accepté de braver le risque lié à l’exposition à Ebola en contrôlant les allers- et retours de tous les voyageurs afin de briser la chaîne de transmission du virus.

Ces personnes sont « nos héros ». Elles collaborent dans la riposte malgré l’hostilité de leurs paires,  les mythes sur la maladie et les superstitions profondément enracinées dans la société sur le sujet.

Parmi ces « héros », nous avons choisi de vous présenter Rachel Androsi Ausi. Cette encadreuse d’enfants de la maternelle de  47 ans  est impliquée activement dans la riposte à Ebola. Découvrez son récit. Elle est notre héroïne.

« Dans la riposte depuis octobre 2018 »

Rachel Andusi Tawusi intègre l’équipe de la riposte seulement deux mois après la déclaration de l’épidémie d’Ebola en RDC. Institutrice dans une école maternelle, Rachel collaborait déjà avec Save The Children et Worldvision dans l’encadrement des enfants. Lorsque la maladie a été confirmée en Ituri, précisément dans la zone de santé de Mandima dans le territoire de Mambasa (Ituri), elle accepte volontiers de collaborer avec les organisations internationales pour empêcher la maladie de se propager à Komanda, cité voisine du territoire de Mambasa.

« J’ai intégré l’équipe de la riposte depuis octobre 2018.  J’ai l’habitude de me lever chaque jour à 5h30, et à 6h20, il faut que je quitte la maison pour arriver sur le lieu de travail au moins à 6h45. Et c’est à 7h00 juste que je débute le travail pour rentrer parfois après 18 heures », relate-t-elle, précisant que dans le Point de contrôle (PoC) de Komanda où elle est affectée, son travail consiste « dans le pointage de thermoflash sur les passagers pour prélever leurs températures, la surveillance de la corde qui permet de contrôler le flux des voyageurs au point de contrôle et à superviser les opérations de lavage des mains avant de les signaler sur une fiche ».

« C’est un privilège de sensibiliser les autres dans le cadre de la prévention»

 

Les équipes déployées dans des points de contrôle font également de la communication des risques en sensibilisant, dans le cadre de la prévention,  les populations sur les règles d’hygiène à observer pour ne pas contracter le virus.

« C’est un privilège de sensibiliser les autres dans le cadre de la prévention. Nous sommes les premiers à être informés sur l’évolution de la maladie. C’est noble de prévenir les autres. En plus, ce travail me permet d’être en contact avec la communauté et d’avoir de meilleurs contacts avec les populations. On se parle avec eux. De fois, ils nous demandent comment évoluent la maladie et on est là pour leur expliquer et ils comprennent plus facilement », se réjouit-elle, soulignant que le risque encouru en acceptant d’être en première ligne dans cette lutte « en vaut la peine » car « c’est noble de contribuer à la santé de sa communauté ».  Mais à quel prix ?

«  Mon quotidien est marqué par des injures et des attaques parfois physiques »

Ca va faire une année depuis que Rachel œuvre dans la riposte à Ebola avec tous les risques. Une vie pas forcément rose.

En effet, sur le terrain, les travailleurs humanitaires et leurs collaborateurs locaux font face à des résistances et à des violences dans une région où plusieurs groupes armés sont actifs. En outre, rumeurs et défiance entravent le travail des personnels de santé : une partie des habitants sont dans un déni de la maladie, le considérant comme « une invention des blancs pour se faire de l’argent dans les dos des pauvres congolais ». Dans ce cas de figure, la plupart de leurs collaborateurs locaux sont considérés comme des complices de cette escroquerie et deviennent facilement les cibles des attaques et injures de leurs compatriotes. C’est le cas de Rachel.

« Depuis le mois de janvier, il y a eu des dizaines d’attaques menées contre des structures de santé et des points de contrôle. On a peur d’être visés. Dieu merci, ce n’est pas encore le cas ici à Komanda. Mais je garde beaucoup de mauvais souvenirs de ce travail. Nous sommes souvent tabassés ici. Des fois, nous recevons des injures de haute qualité et des menaces», révèle-t-elle. Pourtant, affirme-t-elle, « le sens de l’engagement à contribuer à la sécurité de tous me pousse à en appeler à chaque congolais  à s’impliquer et à travailler main dans la main avec l’équipe de la riposte pour bouter Ebola hors de notre pays ».